Bien que les interventions liées au mode de vie montrent un potentiel prometteur pour lutter contre les maladies cardiométaboliques, leur succès à long terme dépend d’environnements politiques qui rendent une vie saine accessible à tous.
Étude : Interventions liées au mode de vie pour la santé cardiométabolique. Crédit image : Shutterstock AI
Une étude récente publiée dans la revue Nature Medicine a examiné les bienfaits des interventions liées au mode de vie combinées sur la santé cardiométabolique.
L’obésité et le surpoids sont des facteurs de risque pour les maladies cardiométaboliques (MCM), dont la prévalence mondiale a triplé ces dernières décennies. Les changements sociétaux ont déplacé l’accent des activités de loisirs ou d’un travail physique vers des modes de vie plus sédentaires et inactifs. Parallèlement, les habitudes alimentaires ont évolué, passant de régimes à base de plantes à des régimes occidentaux, caractérisés par des aliments riches en énergie, pauvres en fibres et riches en sucres. L’étude met en avant que ces tendances touchent de manière disproportionnée les populations socio-économiquement défavorisées, où la prévalence des MCM peut être jusqu’à cinq fois plus élevée que dans des groupes plus aisés.
Les interventions liées au mode de vie combinées visent plusieurs comportements de vie et pourraient prévenir les MCM chez les populations à risque. Cependant, à long terme, leur efficacité n’est pas toujours durable et leurs effets diminueront lors des soins de routine. Dans cette étude, les chercheurs ont évalué les avantages à court et à long terme ainsi que la rentabilité des interventions liées au mode de vie pour l’obésité, le surpoids et les MCM associés dans des études contrôlées et lors de soins habituels.
Contributions des comportements liés au mode de vie au risque de MCM
Les régimes alimentaires malsains, riches en graisses saturées, en sodium et en sucres ajoutés, et la faible consommation de fruits et légumes sont des contributeurs majeurs à la mortalité prématurée liée aux MCM. Ensemble, ces facteurs représentent jusqu’à 35 % des décès liés aux maladies cardiovasculaires (MCV). De plus, l’inactivité physique aggrave le développement des MCM, contribuant respectivement à environ 6 % et 7 % du fardeau des MCV et du diabète de type 2 (DT2).
Par ailleurs, le comportement sédentaire augmente également le risque de MCM. Bien que d’autres comportements de vie, tels que le stress chronique et le manque de sommeil, soient associés à un risque plus élevé de MCM, leur contribution à la charge mondiale de MCM n’est pas clairement définie. L’étude souligne que les comportements malsains ont tendance à se regrouper, en particulier dans les communautés défavorisées, ce qui augmente le risque de décès prématuré. Ainsi, il est crucial de s’attaquer à plusieurs comportements de vie simultanément pour améliorer la santé cardiométabolique.
Effets des interventions liées au mode de vie combinées
Les interventions liées au mode de vie combinées sont dispensées par des professionnels de la santé dans des programmes structurés et contrôlés, ciblant souvent l’inactivité physique, l’activité physique et les comportements alimentaires. Les preuves indiquent que ces interventions ont systématiquement réduit l’incidence du DT2 d’environ 40 % sur trois à six ans d’intervention chez les individus à haut risque, par rapport aux soins habituels dans des environnements contrôlés.
Les effets des interventions sont principalement dus à des réductions des marqueurs glycémiques, du poids corporel, de la pression artérielle et du cholestérol LDL. De plus, des études comparant ces interventions au métformine, un médicament hypoglycémiant, ont montré que le médicament était environ deux fois moins efficace que les interventions liées au mode de vie. Une méta-analyse a révélé qu’une intervention diminuait le risque de DT2 de 60 % par rapport à la pharmacothérapie, et cet effet était en partie persistant pendant plusieurs années après l’intervention, comme l’indique l’étude de prévention du diabète finlandaise, qui a enregistré une réduction soutenue de 20 % de l’incidence du diabète 20 ans après l’intervention, soulignant le potentiel des avantages à long terme.
Les évaluations longitudinales des interventions au-delà de la période active d’intervention ont révélé une réduction du risque de DT2, bien qu’à un degré moindre, sur 3 à 20 ans de suivi. Malgré ces avantages à long terme, les méta-analyses n’ont pas observé d’effets durables des interventions sur la mortalité cardiovasculaire ou la mortalité toute cause. Cependant, l’étude Da Qing de prévention du diabète en Chine a montré une réduction significative de la mortalité toute cause et de la mortalité cardiovasculaire après 23 ans de suivi, mettant en évidence la variabilité des résultats selon les contextes.
Implémentation des interventions et coût-efficacité
Des études ont permis de traduire les interventions contrôlées en pratiques de soins habituels en raison de leurs effets prometteurs sur le risque de DT2. Une méta-analyse de 25 études de traduction ou évaluation avant-après a établi qu’environ un tiers à la moitié de l’efficacité observée dans les études originales était atteinte, avec une perte de poids cliniquement pertinente après un an, entraînant des améliorations des facteurs de risque de MCM.
En se basant sur ces analyses, des programmes de prévention du diabète ont été mis en place pour les individus à haut risque en Finlande, aux États-Unis, en Australie et au Royaume-Uni. Cependant, les preuves quant à l’efficacité de ces mises en œuvre demeurent limitées, bien que ces programmes semblent efficaces pour ceux qui les ont complétés. En ce qui concerne la coût-efficacité des interventions liées au mode de vie, les données sont insuffisantes dans la pratique courante. L’étude souligne la nécessité d’évaluations économiques supplémentaires, notamment dans les pays à revenu faible et intermédiaire où la prévalence des MCM augmente rapidement.
Approches à l’échelle de la population pour des modes de vie sains
Bien que les interventions liées au mode de vie aient été efficaces pour prévenir les MCM, cibler uniquement les individus à haut risque dans les soins habituels ne suffira pas à réduire la prévalence des maladies métaboliques au sein de la population. Des mesures visant l’ensemble de la population sont donc nécessaires. Les approches basées sur la population ont réussi à réduire le tabagisme de 27 % à 37 % ; cela pourrait servir d’exemple pour orienter les décisions politiques influençant d’autres comportements de vie.
Les politiques d’urbanisme peuvent également jouer un rôle clé dans la réduction du risque de MCM. Par exemple, la conception de quartiers propices à la marche et l’augmentation de l’accès aux espaces verts ont été associées à de taux plus bas de DT2 et de MCV. De même, la mise en place de taxes sur les boissons sucrées et la subvention des fruits et légumes peut influencer positivement les habitudes alimentaires, notamment parmi les populations défavorisées.
Conclusion
Bien que les interventions liées au mode de vie aient montré des bénéfices en matière de MCM lors des essais et des améliorations cliniques lors des études de traduction, leurs effets à long terme dans la pratique courante nécessitent des évaluations supplémentaires. De plus, il est important d’examiner les facteurs incitatifs et les obstacles à la mise en œuvre de ces interventions. Ensemble, ces interventions peuvent induire des effets cliniques pertinents sur la santé métabolique, surtout lorsqu’elles sont soutenues par des mesures politiques et des environnements favorables cible l’ensemble des comportements de vie au niveau de la population. Par conséquent, les interventions liées au mode de vie doivent rester un élément essentiel des stratégies de lutte contre l’épidémie de MCM.
Notre point de vue
Face à la montée des maladies cardiométaboliques, il semble urgent de repenser nos abordages en matière de santé publique. Les interventions axées sur le mode de vie doivent être accompagnées de politiques globales qui favorisent un environnement propice à l’adoption de comportements sains. C’est un défi collectif qui nécessite l’implication de tous, des gouvernements aux citoyens, pour transformer notre cadre de vie et véritablement faciliter l’accès à une alimentation saine et à l’activité physique. L’éducation et la prévention doivent donc être des priorités afin de réduire les inégalités en matière de santé et garantir un avenir où chacun a la possibilité de vivre en pleine santé, indépendamment de ses circonstances économiques.